3ème étape, passons à l’étude des expériences scientifiques réalisées par Beiersdorf !

(cet article est la suite de celui-ci, de celui-là), et de celui-là)

Résultats des expériences réalisées par Beiersdorf

Les laboratoires Beiersdorf ont présenté les résultats de leur recherches dans un congrès très sérieux de dermatologie en 2010 (EADV  – European Academy of Dermatology and Venereology), sous forme d’un poster :

Schrader, A., Hiddemann, S., Scherdin, U., Conzelmann, S., Siefken, W., Blatt, T.: AQP-3: a key target to influence human skin moisturisation. Poster, EADV Congress 2010

ce qui donne une certaine crédibilité à ces travaux puisque les chercheurs de chez Beiersdorf se sont risqués à présenter le fruit de leurs recherches à la communauté scientifique spécialisée dans le domaine. Bien sûr, nous aurions préféré voir une publication internationale plutôt qu’un poster, car cela aurait ajouté encore une plus-value à ces travaux, mais cet effort est déjà louable pour un organisme de recherche privé.

Malgré plusieurs demandes répétées à Beiersdorf pour obtenir une version du poster où une description des travaux, nous n’avons obtenu aucune réponse. Heureusement, à force de recherche sur le net, nous avons pu trouver le poster sur le site de … Eucerin ! Eh oui, les travaux de Beiersdorf sur les aquaporines ne servent pas qu’à Nivea mais à toutes leurs marques associées.

Cliquez l’image ci-dessous pour voir le poster :

le poster de Beiersdorf

Les recherches sur l’AQP-3 ont été à la fois réalisées « in vitro », c’est-à-dire sur des cultures de cellules, et « in vivo », chez l’humain. La raison en est simple, il est impossible de vérifier que les humains s’appliquant de la formule à base de gluco-glycerol présentent un taux d’aquaporine plus élevé. Il est donc nécessaire de procéder en 2 étapes : d’une part démontrer que le gluco-glycerol augmente le taux d’aquaporine chez des cultures de cellules de la peau (les kératinocytes), puis démontrer que le gluco-glycérol améliore l’hydratation de la peau.

La première étape « in vitro » a donc pour but de démontrer que le gluco-glycérol augmente la quantité d’aquaporine au niveau cellulaire. Ce résultat primordial est étrangement absent du communiqué de presse. Nous allons vous décrire les expériences et résultats obtenus d’après le poster.

Les chercheurs de chez Beiensdorf ont étudié l’efficacité du gluco-glycerol sur des cultures de kératinocytes (cellules de la peau) et ont mesuré l’expression de différentes molécules.

Tout d’abord, ils ont mesuré la quantité d’ARN messager (copie transitoire d’une portion de l’ADN utilisé pour la synthèse des protéines) dédié à l’expression d’AQP3 après avoir incubé les kératinocytes pendant 24h dans du gluco-glycerol. Une augmentation de la quantité d’ARNm de 215% par rapport aux cellules contrôle non traitées a été observée ! En présence de gluco-glycerol, la cellule envoie bien le message signalant la nécessité d’augmenter la présence d’aquaporine. Comme ces canaux aqueux sont constitués de protéines, il est ensuite crucial de voir s’il y a effectivement plus de protéines AQP-3 dans la cellule.

Pour ce faire, les auteurs ont cette fois-ci incubé les kératinocytes pendant 48h dans une solution contenant du glucoglycérol, puis ont utilisé des anticorps pour révéler la présence de protéines AQP3. Par rapport à une solution contrôle, la quantité de protéines AQP3 en présence de glucoglycérol était augmentée de 256% !

Pris ensemble, ces résultats montrent que la stimulation d’AQP3 est très fortement augmentée en présence de gluco-glycérol, ce qui laisse supposer un plus grand nombre de canaux AQP-3 permettant de laisser passer l’eau sur la membrane des cellules.

Reste à démontrer l’efficacité « in vivo », c’est-à-dire lorsque cette fois-ci les cellules de la peau ne vont plus baigner dans la solution pendant 1 ou 2 jours mais juste recevoir une application de gluco-glycerol sur la peau.

Revenons au communiqué :

« Des mesures in vivo ont mis en évidence une réduction significative des pertes transépidermiques en eau après l’emploi de formulations topiques contenant du glucoglycérol. »

Cette petite phrase résume l’expérience suivante:

chez 23 sujets contrôles, les auteurs ont asséché la peau au niveau de la face antérieure de l’avant bras. Pour ce faire, les auteurs ont lavé intensément avec du savon l’avant bras des sujets pendant 90s, 2 fois par jour pendant une semaine. A la fin de cette semaine, ils ont appliqué un produit contenant du gluco-glycerol. Les résultats obtenus montrent que le gluco-glycerol a restauré la barrière cutanée car les pertes d’eau vers le milieu extérieur sont diminuées.

Pour être tout à fait honnête, cette étude est celle qui nous parait la moins convaincante. Il y a finalement assez peu de sujets testés, l’effet n’est que faiblement significatif, et surtout les auteurs n’ont semble t il pas comparé l‘effet du produit avec un contrôle sans gluco-glycerol. On reste avec l’impression que d’autres produits hydratants auraient pu être aussi efficaces.

Le communiqué de presse se poursuit ensuite avec les résultats suivants :

« Une amélioration effective a pu être prouvée. Dans le cadre d’un essai contrôlé par placebo effectué sur 23 personnes présentant une peau déshydratée, des améliorations significatives ont été constatées pour les paramètres les plus fréquemment rapportés, à savoir dessèchement de la peau, squames et formation d’érythèmes. »

A partir du poster, nous ne voyons pas à quelle étude cela peut correspondre vu qu’il n’est jamais question de placebo chez ces sujets. Bien qu’il puisse s’agir d’une autre étude, on a tout de même l’impression que cet extrait du communiqué de presse mélange les résultats de l’étude contrôle ci-dessus, et de ceux de l’étude patients que nous allons voir maintenant.

« D’autres études cliniques ont révélé que le taux d’amélioration des paramètres « sécheresse » et « formation d’érythèmes » était nettement plus élevé chez les patients traités avec une formulation contenant du glucoglycérol que chez les patients traités avec une base exempte de principe actif (85,7 % contre 60 % et 71,4 % contre 56,3 %). La tolérance de la peau à la préparation contenant du glucoside a été qualifiée de « très bonne » ou « bonne » par 85 % des patients traités. »

Voici les détails de cette étude réalisée chez 180 patients. Pendant 2 semaines, la moitié de ces patients ont reçu un produit pour la peau contenant du gluco-glycerol, et l’autre moitié à reçu un produit équivalent sans gluco-glycerol (Eucerin hydro-balance pour Peau Sèche). Les mesures ont été effectuées sur la peau du visage.

La façon dont les résultats sont présentés dans le communiqué de presse et sur le poster prête à discussion. Les pourcentages présentés sont ceux de la figure 4 du poster. Or, en ordonnée, nous n’avons pas un « taux d’amélioration », mais un pourcentage de patients chez qui le produit est efficace. Ce qui change beaucoup de choses ! Les résultats présentés ici ne signifient pas que la formulation contenant du gluco-glycerol est plus efficace que celle n’en contenant pas, mais que l’effet bénéfique du produit s’observe chez plus de patients. On pourrait par exemple supposer que le produit contenant du gluco-glycerol fonctionne sur plus de patients mais moins efficacement qu’un autre produit. Bien sûr ce n’est surement pas le cas, mais cette notion de « taux d’amélioration » est assez trompeuse. Ce que l’on peut dire, c’est que la formulation contenant du gluco-glycerol est efficace sur 20% de patients de plus que celle n’en contenant pas.

De plus, la lecture de ces résultats suscite d’autres interrogations. La figure 4 du poster montre que d’autres paramètres ont été testés : la desquamation (scaling = perte des couches superficielles de l’épiderme) et la tension de la peau (manque d’élasticité). La figure montre une efficacité certaine du produit avec environ 75% et 79% des patients chez qui le produit a eu un effet positif. Le problème est que l’on ne connait pas les valeurs obtenues pour la préparation  sans gluco-glycerol. On peut supposer que si le résultat n’est pas présenté dans le texte, c’est qu’il n’est pas significatif, cependant la légende de la figure 4 semble signifier que tous les effets étaient significatifs. Que croire ? Il nous est impossible d’aboutir à une conclusion définitive avec les données disponibles.

Nous allons terminer par une dernière étude présentée sur le site de Beiersdorf et non présenté dans le poster ni dans le communiqué:

« In various clinical and dermatological studies as well as consumer tests on over 750 participants, the intensive moisturizing effect was verified only 24 hours after one application. After one to two weeks of regular use subjects’ skin moisture was optimized and deeper layers of skin were provided with long-lasting moisture. »

Ce résultat s’attarde sur l’effet hydratant du produit. Le but était certainement de démontrer que l’efficacité du gluco-glycerol pouvait s’observer non pas après 2 semaines de traitement comme chez les patients, mais après une simple application. Bien sûr nous n’en savons pas plus sur les tests réalisés chez plus de 750 utilisateurs du produit.

 
Le prochain épisode sera le dernier et nous donnerons notre conclusion ! A suivre…

 


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